Quand je vois passer un bateau
Quand je vois passer un bateauJ'ai envie de me foutre à l'eauEt d'enjamber le bastingageEt vivre entre le ciel et l'eauLe reste de mon âge.J'ai envie d'aller où il vaRemonter le long de JavaDescendre à terre, le soir au mouillageEt rire comme un étrangerD'un rire qui fait éclaterLa rose bleue d'un tatouage.J'ai envie d'aller loin d'iciBrûler ma vie dans ces paysOù les cargos éventrent les collinesAller de Manille à CubaChanger le coton en tabacEt le tabac en cocaïne.Plonger le poing rongé de selDans le corsage d'arc-en-cielD'une chinoise ou bien d'une manoucheEt prendre ses seins tout petitsComme des œufs au fond d'un nidPour les écraser sur ma bouche.Tailler, le couteau bien en mainUne balafre à mon destinEt enlacer ces filles malhonnêtesQui, par un mouvement des reinsAllument le sang des marinsAu fonds des clandés de Papeete.Défilant le long du bateauRegarder les champs de pavotsSemés de filles à la démarche étrangeLe pan de la jupe fendueBat l'amble sur des jambes nuesJuteuses comme des oranges.Quand je vois passer un bateauJe rêve de me foutre à l'eauEt n'ai besoin d'autre SésameQue d'être là, à mon pianoA rêver sur la gamme.